Analyse statistique de l’accessibilité à l’eau

Accessibilité à l’eau des sites historiques

On vient de voir qu’un géoréférencement précis permet une analyse précise de la dynamique spatiale dans la région.

D’autres types d’informations peuvent être obtenues grâce à des calculs statistiques. Ces calculs sont dérivés de traitements particuliers de l’analyse spatiale.

Les données de terrain sont combinées pour permettre une analyse comparée de l’accessibilité à l’eau des époques anciennes jusqu’aujourd’hui. On obtient un regard nouveau sur des phénomènes complexes, tels que des modes de vie ou des systèmes d’échanges.

Une analyse statistique portant sur l’accessibilité à l’eau des sites chams détermine une valeur médiane autour de 400 mètres ; c’est-à-dire qu’il conviendrait de distinguer deux types de fonctions pour les sites chams, s’établissant sur la base d’une distance à l’eau inférieure ou supérieure à 400 mètres.

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Les sites chams situés à une distance d’une rivière inférieure à 400 mètres sont tout d’abord les citadelles, qui toutes sont établies directement sur un cours d’eau. On connaît cinq citadelles chames dans la région, trois dans la province de Quảng Trị et deux dans la province de Thừa Thiên – Huế. Dans le Nord, l’accès septentrional était gardé par la citadelle de Co Luy (Thanh Co Luy) au bord de la rivière Hien Luong, datant probablement du Xème siècle. La plaine centrale, dans les méandres du fleuve Thach Han, était gardée par les citadelles Thuan Châu (Thanh Thuan Châu, également appelée Ve Nghia, du nom du village moderne le plus proche) et Co Thanh. Dans le Sud, Thanh Loi surveille la rive sud de la rivière des parfums et Hoa Chau surveillait une probable ouverture sur la mer, probablement située vers les passes de Hoà Duan ou de Thai Duong Ha.

Le rôle de chaque citadelle chame ancienne paraît bien se structurer autour du rôle joué par l’eau. La citadelle de Thanh Loi, dans la province de Thừa Thiên – Huế, est datée du VIIIème siècle ; installée au bord de la rivière des parfums, elle semble plus destinée une protection aux populations locales. Au Xème siècle, les citadelles chames paraissent plus destinées à superviser l’accès vers la mer. Ainsi, dans la province de Quảng Trị,

la citadelle de Co Luy, longe le fleuve Hien Luong (aussi appelé fleuve Hoi/Minh Luong/Ben Hai) qui se jette dans la mer à l’embouchure Viet (cua viet) ;

la citadelle Thuan Chau se trouve sur un réseau secondaire du fleuve Thach Han (aussi appelé fleuve Cai ou rivière de Quảng Trị) qui débouche sur la mer à l’embouchure Tung (cua Tung) ;

la citadelle Co Thanh, aujourd’hui détruite par les modifications du cours du fleuve Thach Han, paraît avoir eu un rôle de contrôle sur la rivière menant à la province de Thừa Thiên – Huế.

Contrairement aux citadelles Nguyễn, aucune des citadelles chames ne semble surveiller les voies d’accès vers les hauts plateaux.

À part les citadelles, tous les autres sites situés à moins de 400 mètres d’un accès à l’eau pourraient avoir eu une fonction stratégique – par exemple dans le contrôle des activités commerciales entre les hauts plateaux et les basses terres. Par exemple, la rivière de Cam Lo, qui vient se jeter dans le fleuve de Quảng Trị qui sillonne toute la plaine, était clairement la voie d’accès principal vers les richesses des hauts plateaux. Elle est jalonnée par plusieurs sites chams du Xème siècle qui doivent être mis en relation avec la mise en valeur du territoire à cette époque.

Schéma de la route commerciale entre les hauts plateaux et les entrepôts chams. Positionnement des sites dans la vallée de Cam Lo.

Par ailleurs, un grand nombre de sites sont éloignés de plus de 400 mètres d’un accès à l’eau aujourd’hui. On peut leur attribuer une fonction de contrôle du territoire. Ces sites sont probablement en relation avec les activités agricoles, ils marquent le territoire et sont plus liés à la topographie qu’à l’hydrologie. On pourrait penser que ces sites sont des repères quasi cadastraux pour les populations locales.